Valérie Paumier sera à Barcelone pour une conférence intitulée "Montagne, symbole de permanence”
Valérie a tout plaqué il y a 5 ans pour se consacrer à un combat : repenser la montagne face à l’urgence climatique. Il s’agit d’alerter et d’intéresser aux causes et conséquences générées par les bouleversements écologiques et trouver des solutions sur les impacts des acteurs de la montagne.
Originaire d’Annecy, elle fait des études de commerce, et entame sa carrière dans la finance en Afrique et surtout en Asie (Taïwan, Chine, Hong Kong). Elle revient en région Rhône-Alpes pour travailler à Genève, toujours dans la finance. Mais elle réalise qu’elle était dans une forme de déni et qu’elle ne peut plus se taire, “je n’ose plus dire ce que je fais”, dit-elle.
“Ma prise de conscience des enjeux climatiques ne date pas d’hier, mais je suis restée en dissonance cognitive durant de longues années. Mon déclic a lieu le jour où l’on m’a demandé d’aider à investir massivement en montagne, marché juteux et très lucratif.”
Elle rencontre alors des élus et des investisseurs en leur expliquant que le “Tout ski” n’est pas pérenne. Elle se heurte alors à ce qu’elle connaît bien : le monde de la finance et de la rentabilité.
Pourtant le modèle du “Tout ski” aggrave un phénomène déjà bien engagé, mais encore plus visible en montagne : le réchauffement climatique. “En montagne, dit-elle, il est deux fois plus rapide, pour des raisons géologiques”. L’eau se raréfie, car les glaciers disparaissent, il neige moins. Or l’eau que nous consommons vient pour moitié des montagnes. “Nous sommes dans une ère de conflit d’usage de l’eau”. Les seules réponses apportées sont technologiques, ce qui empire le phénomène.
Canons à neige
“30 % du domaine skiable en France est enneigé par des canons à neige” ce qui représente 28 millions de mètres cubes d’eau, puisque pour faire de la neige il faut de l’eau, que l’on va chercher dans les torrents, les rivières ou les lacs, ce qui engendre des problèmes pour la faune et la flore, et même pour les lacs eux-mêmes. “Le lac d’Annecy s’asphyxie, en surface il a perdu plus de 5 % d'oxygénation. À Val d'Isère, une station à 1800 m d’altitude, on utilise 624 canons à eau. On nous fait croire que l’on peut continuer à skier, enneiger, grâce à la technique, mais les effets sont catastrophiques.”
“On doit pouvoir parler de sobriété avec les pouvoirs publics et les élus. La demande doit s’adapter à l’offre. Dans 20 ans, le réchauffement sera tel que les canons à eau ne fonctionneront sans doute pas. Il faut faire avec l’existant”, affirme Valérie.
Retenues collinaires
Une autre aberration dénoncée par Valérie, ce sont les retenues collinaires. Des trous gigantesques, des méga-bassines, alimentés par ruissellement ou par pompage des rivières, des torrents ou des lacs pour alimenter les canons à neige. Ce qui accentue l’assèchement des terres et entraîne des déforestations. Un programme de la région Rhônes-Alpes prévoit la construction de 100 retenues. “Tout cela financé avec de l’argent public pour des promoteurs et investisseurs privés”.
Elle dénonce également la folie immobilière et la pression foncière de la part des pouvoirs publics et des promoteurs. Le prix du mètre carré à Val d’Isère est de 25 000 euros, à La Clusaz, un village, il est de 13 000 euros : “Parce qu’il faut des lits, il faut remplir, quitte à ce que les habitants déménagent parce que la vie est trop chère. Il faut arrêter de construire !”. D’autant que le gros de la pollution en montagne est dû à la mobilité.
En fait pour une montagne plus durable “il faut rééduquer les gens, en commençant par les enfants. Il faut stopper le "Tout ski". Relancer l'artisanat et proposer des activités autres que le ski. Avoir des stations plus nature. L’écologie est une science qui devrait être enseignée à l’école”.
*Conférence "Montagne, symbole de permanence" organisée par Français du monde, le 25 mai à 19h au centre euro-arabe.